• Soundtrack of your life

    Ici, toi aussi raconte-nous la bande-son de ta vie.

    Fais-nous découvrir tes artistes inconnus : la grand-mère qui rappe sur du Bach, le saxophoniste ouzbèque qui fait des reprises de Charles Trénet, le chien qui compose des symphonies pour cordes, ou aussi des poppeux canadiens ou des folkeuses qui imitent Cat Power...

    Cet espace est le tien. Ne me remercie pas.

     

     

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    Christian Death: Ashes (1985)

     

    Blaise's track #04 - Ashes

     

     

     

       Cette chronique aurait sans nul doute pu s' appeller: Mes années 80 à moi  avec en sous-titre « Ou: Lettre ouverte à Charlie Brown en réponse à son billet intitulé "Charlie's Track #06 - Smalltown Boy" du 5 Oct. 2011 placé dans la rubrique « Shit in your ears«  (et encore heureux !) »

       Mon cher Charlie, la première chose que j' ai à te dire, c' est que, années 80 ou pas, c' est pas très joli-joli d' avoir de la haine pour quoi que ce soit d' autre que pour la haine elle-même. Non, pas beau du tout ! Alors qu' il est si bon et si doux d' aimer ! Moi, depuis que j' aime aimer et que je hais haïr, ma vie est un enchantement permanent. Voilà, c' est dit, vas en paix maintenant.

       Moi aussi, je fus un ado qui grandit dans un trou paumé à une époque où pour entendre autre chose que ce que nous proposaient la radio et la télé, fallait drôlement se sortir les doigts du cul. Un grand frère de quatre ans plus âgé que moi me fut d' une grande utilité, c' est vrai. Quand il s' est mis à bosser l' été pour se faire des ronds et pouvoir s'acheter de temps en temps des disques le reste de l' année, ça a été pour moi très riche de découvertes. Car c' était pas avec les 20 balles mensuelles d' argent de poche que m' octroyaient mes parents pour de menus services ou tâches ménagères rendus au sein du foyer (débarrasser la table, sortir les poubelles, vider le lave-vaisselle, tondre la pelouse, lustrer la Porche familiale, épousseter les Renoir et les Rodin du grand salon de réception, bouchonner les chevaux du harat, passer la coque du voilier à l‘ antirouille, surtout sous la ligne de flottaison bien sûr. Très important et très délicat ! Un été, au large des Açores, on a eu quelques avaries à cause de ça. Faut voir comment Père m‘ a houspiller !) que je pouvais me goinfrer de musique de manière autonome.

       Mais la télé et la radio, même avec l' émergence des radios dites libres (je me gausse !), j' ai assez vite compris que ça pisserait jamais bien loin et que le bonheur était au-delà. Quelques acolytes bien cons, artistiquement et culturellement sous-développés de mon bahut (aujourd'hui, charitablement, je me dis que la musique, c' était tout simplement pas leur truc.) me servaient également de parfaits exemples à ne pas suivre et il était donc pour moi assez aisé de ne pas me fourvoyer dans des ramifications musicales qui, en plus de me faire perdre du temps, ne me mèneraient nul part. Et somme toute l’ enseignement que je pus tirer de tout cela peut être grosso-modo (car il y a tout de même des contre-exemples !) dit comme ceci: « Si tu veux des chansons qui cassent pas trois pattes à un canard avec des synthé nunuches et des boîtes à rythmes chiantes, écoute la radio. Si t’ en veux pas, écoute des disques ! » Ce qui met un peu à bas les stéréotypes sur les 80’s toujours en vigueur de nos jours. Rien de plus énervant que d’ entendre partout et toujours que les 80’s, sont régressives car c’ est les années Top 50 avec seulement de la popinette mièvre à deux balles sur du matos en plastique de chez Bontempi. C’est vrai quoi, à la fin, non mais sans blague ! Y a pas que ça et de très bonnes choses ont été faites à base de synthé. Même si c’ est pas trop ma came, je suis près à le reconnaitre. Y a des trucs de qualité (Et là, je suis pas en train de parler de "Mama"  de Genesis. Si les 9/10eme des groupes où chanteurs des 70’s ont complètement foiré le tournant des années 80, c’ est pas tellement la faute aux nouveaux arrivants, hein !) Juste c’ est pas vraiment de mon goût. Car personnellement, que ce soit la Pop sirupeuse et chatoyante ou l’ Electro-Indus-Dark-je-sais-pas-trop-quoi à la Front 242 ou Laibach, c’est pas trop mon truc. A part Trisomie 21, allez savoir pourquoi !

       Et donc, où cela m‘ a-t‘ il mené ? Y a eu pleins de groupes que j’ ai adoré mais surtout un qui fut pour moi déclencheur de ce que seraient les prochaines années de mon paysage musical. Nan, c’ est pas Duran-Duran… Nan nan, c’ est pas non plus Alphaville… pas plus que c’ est Bronski Beat ou A-ha, Vous être froid, là, cherchez encore… Modern Talking ? Ouh, c’ est glacial !!! Spandau Ballet ? Laissez-moi rire ! Propaganda ? Pfff… même pas sûr que j’ en connaisse une seule note ! Tears for Fears ? C’ était pour les gonzesses ça, non ? … Allez, vous trouverez pas et ça vous dira peut-être pas grand-chose (mais c’ est la raison d’ être de ce billet !) donc je vous le lâche: Christian Death.

       Je connaissais déjà ce groupe par un album, le très bon « Catastrophe Ballet » que j’ adorais et qui passait en boucle dans mon magnétophone à K7 (j’ ai eu un ghetto blaster que plus tard) mais le jour où j’ ai entendu les première minutes d’ « Ashes », premier titre de l‘ album du même nom, houlala… je senti bien que j’ avais mis l’ oreille dans quelque chose totalement pour moi et j’ ai tout de suite trouvé ça magistrale ! Ca démarre bien gentiment au piano, très calme… et en crescendo ça t’ entraine en sept minutes - pas courant ça à l’ époque ! - jusqu’ au chaos final, toutes cymbales dehors, fûts martelés, guitares maltraitées, basse lourde, cris que même Aretha Franklin n’ aurait jamais osé pousser, petites percu discrètes, congas je crois, mais bien sympa. (Plus tard, en découvrant « Weld » de Neil Young et ses interminables finals du même métal, j’ ai tout de suite repensé à ce « Ashes ». Charlie, je dis pas ça pour te forcer à écouter le morceau jusqu’ au bout, hein !…)

       Un autre très bon album, « Atrocities », qui est même peut-être encore meilleur, je dois l’ avouer (mais bon moi, toute mon affection est pour « Ashes »), sortira un an plus tard en 86 mais sans Rozz Williams le chanteur et fondateur, parti pour d’ autres aventures encore plus extrêmes. Puis il restera à sortir « The Scripture » en 87 (’tain je l‘ ai attendu celui-là !), encore un très bon, avant que ça tourne à la caricature d’ eux-même. Le guitariste multi-instrumentiste Valor ayant déjà depuis longtemps les pleins pouvoirs mènera le groupe, c’ est à dire lui-même puisque les autres membres sont plus ou moins à géométrie variable comme on dit, vers un espèce de métal goth pas toujours très inspiré et encore moins de bon goût. J’ ajoute qu’ « Ashes » est le troisième et dernier album où Rozz Williams apparait. Le premier « Only Theatre of Pain » est bien mais sa voix est un peu trop théâtrale et larmoyante. Elle est beaucoup mieux à partir de « Catastrophe Ballet », le deuxième. Et en plus de ça, il était plutôt joli garçon !

      

    Blaise's track #04 - Ashes

    Rozz Williams (1963 - 1998)

      

       Donc je venais de passer un cap. J’ étais déjà passé par Cure, Siouxies, U2, Talk Talk, et même dans une certaine mesure Depeche Mode (mais que j’ ai plutôt toujours trouvé bof bof !), me restait à découvrir Sisters of Mercy, Bauhaus, Virgin Prunes, Alien Sex Fiend, Einstürzende Neubauten… toute une pléiade de groupes post-punk, donc moins portés sur les synthé que sur la théâtralité (comme chez Virgin Prunes… des malades ceux-là, surtout à leur début !) et un certain esthétisme noir et froid hérité aussi bien du cinéma Expressionniste que de Gustave Doré, de Lautréamont ou d’ Edward Burne-Jones, de Kafka ou d’ Egon Schiele, d’ Edgar Poe ou des films de la Hammer, Kurt Weill et du « Cabaret » Allemand, peut-être un peu aussi pour certains, la Secession Viennoise, Gustav Mahler, Hugo Wolf… Rien que cela ! ( merde, qu’ est-ce que ça en jette cette liste de noms !)

     

        Un autre extrait du même album. L‘ intro est du même genre qu’ « Ashes » le reste est plus calme, plus mélodique et sage, quasiment un slow même. (D’ ailleurs en y repensant bien, si j’ avais été plus dégourdi à l‘ époque, sûr que j’ aurai pu en emballer certaines que j’ ai connu, grace à ce morceau. La petite Sonia par exemple, pas si petite que ça d' ailleurs, elle était plutôt fine et élancée mais pour moi elle restera la petite Sonia à tout jamais. Très gentille, blonde jusqu’ en bas des reins, des yeux très doux qui souriait timidement. Je crois qu’ elle m’ aimait bien en plus. Ah, aveugle que j’ étais !… Ca m’ aurait très certainement évité d’ être déniaisé qu’ à 28 ans et ça m’ aurait permis de démarrer dans la vie plus armé, avec plus d’ assurance et de confiance en moi… Oui bon et alors quoi ? C’ est ma vie, bordel et je vous emmerde ! Laissez-moi vivre et occupez-vous de votre cul à vous ! Pourquoi vous me parlez de ça d’ abord ?… C’ est comme pour le pipi au lit, lâchez-moi avec ça, qu‘ est que ça peut vous foutre ! Fichez-moi la paix, putain !)


    Christian Death: The Luxury of Tears (1885)

     

     

      

      

    Blaise's track #04 - Ashes

     

     


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    "This match made was made in a moment
    But now that moment's passed

    I don't know why, don't know why, I don't know why you stay"

     
    J'ai failli chialer en réécoutant cette chanson l'autre jour. Ensuite j'ai réécouté tous leurs disques. Et je me suis dit qu'il était temps de vous parler d'Essex Green. J'en fait un Live track parce que je vais vous narrer mon excellent deuxième concert en leur compagnie même si je ne crois pas que vous en ayez quoi que ce soit à foutre.

    J'ai découvert The Essex Green dans la foulée de tous les groupes Elephant 6 dont je vous parlerai peut-être un jour (ils auraient presque tous droit à leur billet à eux mais ça ferait beaucoup). C'est une pop légère, teintée de folk, un peu old school, des mélodies à tomber par terre et une voix exceptionnelle, celle de Chris Ziter (celle de Sasha Bell n'est pas mal non plus). Ils viennent du Vermont en passant par Brooklyn, je sais pas pourquoi.

    Ce premier morceau est tiré du dernier album, Cannibal  Sea, qui date de 2006. Année, comme tu peux le constater, de mon deuxième et dernier concert de Essex Green. Je les ai vus une première fois à Cologne, j'avais discuté avec le coco (Chris Ziter, le chanteur) je sais plus où, sur myspace à l'époque j'imagine, je lui avais dit que je venais à Cologne les voir, il m'avait dit qu'on se boirait une bière, j'en ai profité comme un con pour lui donner une petite leçon de français vu qu'un de leurs morceaux s'appelle Rue de Lis et qu'il prononce ça Roue de Lit, il m'a promis de tenter de la chanter comme ça, je crois qu'il y est jamais arrivé. Voici le morceau (tiré lui aussi du dernier album), magnifique, sautillant, prenant, j'ai l'impression d'être là, dans la Rue de Lis (qui n'existe pas au passage) et de voir passer le cortège derrière le cercueil de ce soldat de l'époque des Mousquetaires. Manque juste Sophie Marceau.


    J'avais un peu gardé le contact après ce concert, j'attendais qu'ils repassent dans le coin quand v'là-t-y pas qu'ils me dit qu'ils viennent en octobre en Europe, l'Allemagne (Cologne de nouveau) et peut-être même la Belgique (j'y ai jamais cru mais bon, l'important c'était de les revoir). Eh ben, à peine réjoui, à peine lui-ai je fait part de mon impatience de les revoir qu'il m'annonce que non, pas possible, Cologne annulé (problème de billets d'avion qu'ils ne peuvent pas changer, ça leur coûtait moins cher d'annuler le concert, déjà qu'ils rentrent pas dans leurs frais avec ces tournées européennes...), rien ailleurs en Europe aussi près (Munich, Berlin, Scandinavie, Royaume-Uni...). Bref déçu. (Vous remarquerez au passage que je raconte vraiment ma vie et qu'elle est palpitante.) Donc, je rage, je désespoir, je vieillesse ennemie (déjà 26 ans à l'époque) quand dans un éclair de génie je m'apperçois que pour une somme modique (je roulais pas sur l'or à l'époque alors qu'aujourd'hui je sais plus quoi en faire) je peux me prendre un aller-retour en avion vite fait pour Dublin. Je lui raconte mon projet fou (je romance un tantinet), il est aussi emballé que moi, me dit que je ne dois me soucier ni d'une place pour le concert, ni d'une chambre d'hôtel, qu'ils me feront une petite place, qu'il a hâte, j'ai hâte aussi, je lui fais pouet pouet, il me fait pouet pouet, on se fait pouet pouet, je vous raconte la suite dans un instant après ce bref interlude.

    (Un mot en vitesse sur ce morceau, qui n'est pas d'Essex Green mais de Guppyboy, un pré-Essex Green des années 90, tantôt ouvertement adolescent tantôt furieusement posé. Dans ce cas-ci une musique du fin fond du Vermont, à deux pas de la frontière canadienne, enfin tu vois quoi, pas très loin de Burlington, l'hiver est rigoureux, le feu crépite, on se sent bien, mais il manque quelque chose, ou peut-être quelqu'un. Et la neige n'en finit pas de tomber.)

    Arrive donc le jour du concert, je quitte Bruxelles le matin, à regret un peu, c'est une si belle ville. (Au passage, ce sera, si je me souviens bien, mon baptème de l'air.) J'arrive à Dublin en début d'après-midi, sans regret, c'est une si belle ville, me rends, après un petit tour des curiosités locales (des pubs ils appellent ça), à la salle dans laquelle ils jouent le soir (un pub ils appellent ça), et j'attends le groupe une Guinness à la main (c'est vraiment pas bon la Guinness mais je voulais faire honneur, je vous dis pas, j'ai honoré leurs chiottes aussi). Je vous la fais courte (haha, tu m'as cru?), on se retrouve, on se boit des Guinness, on fait un tour en ville (voir photo ci-dessous, oui Peps, photo prise avec talent par moi, la deuxième aussi d'ailleurs, je vous les présente, Jeff - guitare, Sasha - clavier et flûte, Julia - basse et Chris - guitare et chant, le batteur était resté à l'hôtel je crois, de toute façon c'est que le batteur), on retourne au pub, je les aide à installer le matériel (j'ai même pas demandé à être payé), on fait un tour backstage, ils m'improvisent "I'm going down" de Springsteen devant le feu ouvert (j'ai une vidéo pourrie de la scène, je devrais la montrer à Yomgui un jour), puis c'est l'heure du soundcheck, bien sympa aussi.

    Eddy's live track #02 - The Essex Green - Whelan's, Dublin (19/10/2006)

     
    Je vous mets au passage peut-être leur plus belle chanson, en version live: Mrs Bean, avec cette flûte traversière enchantée, cette mélodie parfaite et cette voix toujours aussi enchanteresse.

    "No I'm not alright
    La da da
    Oh and it feels like thunder outside"


    Ce morceau est tiré de leur premier album Everything Is Green sorti en 1999. On pourrait discuter 20 ans, on en arriverait de toute façon à la même conclusion, il est déjà parfait. Primrose sautillante d'entrée, Grass et sa voix semblant venir d'outre-tombe, Everything is green d'une fraîcheur rarement atteinte, Sixties et son côté punk (je déconne, hahah, un côté sixties je crois), Carballo bien poignante qui clôt cet album idéalement... Et bien sûr Mrs Bean. Tout est bon sur cet album. Je suis enchanté comme je disais plus haut.

    Bon, je continue mon récit passionnant (je suis encore en train de me demander pourquoi je l'écris): après le souncheck, Chris et moi allons manger un truc à côté, on discute des Beatles, il me parle des musiciens du collectif Elephant 6 que je vénère (j'en ai rencontré certains l'année précédente, je t'en parle à l'occasion), de la ressemblance de leur batteur avec Mark Lanegan, de nos études respectives (il s'est endormi), de philosophie (il est incollable sur BHL) et de la situation politique belge (je suis incollable sur BHV). Mais bon, y a quand même un moment où faut faire péter les watts, hein gros? Donc on y retourne, on se tape le groupe en première partie depuis le balcon (la musique était bien mais j'ai longtemps craint que le chanteur ne s'endorme sur son micro) et on se prépare à monter sur scène. Enfin, ils se préparent à monter sur scène, j'ai décliné leur invitation à les rejoindre, de peur de leur faire de l'ombre. Puis je suis pas sûr qu'ils auraient accepté qu'on fasse une reprise de Jean-Jacques Goldman.

    Bon, je parle je parle, mais faut bien que je vous parle du concert trois minutes hein. Il était très bon. Une setlist principalement composée de morceaux du dernier album (Cannibal Sea si tu suis un peu), dont Rue de Lis dedicated to a friend in Belgium (putain, je fais ma groupie là non?), mais parsemée de perles des albums précédents dont Mrs Bean - haaa Sasha et sa flûte - et The Late Great Cassiopia (Lee, le batteur fut assez impressionnant sur ce morceau) que voici pour vous:

    "I'd wheelie in the sky or anything else, I promise
    I will until the day that I die"


    Ce morceau impeccable (ces harmonies à tomber, Brian Wilson se retourne dans sa tombe) est tiré de leur deuxième album, The Long Goodbye. Un long adieu comme on aimerait en entendre tous les jours. Comme vous pouvez le remarquer régulièrement, je suis un piètre chroniqueur musical. J'aurais moins de mal à décrire une rage de dents que mon album préféré. Mais je vais quand même essayer: cet album me semble un peu plus électrique que le précédent mais pas vraiment (Julia, Sorry river ou Berlin sont absolument acoustiques), plus produit aussi mais c'est pas tout à fait exact si on écoute bien, quand même un tout petit peu plus enraciné dans une certaine tradition américaine nonobstant une modernité latente (ça se voit que je brode et que ça veut rien dire?).

    Bref, comme le dit si bien John Wray (un écrivain dont je n'ai jamais entendu parler) sur la face arrière de la pochette: "Why is this disc so kind? Because the Essex Green are kind." Merci John, je n'aurais pas mieux dit.

    La fin de soirée s'est achevée sans Jeff, Sasha et Julia, fatigués, à la Guinness toujours et au whisky (faire honneur, encore faire honneur, j'allais pas demander une Chimay quand même? Si?). Nous sommes allés dormir, ils m'ont fait une petite place dans leur chambre d'hôtel (j'entends encore le réceptionniste nous demander, admiratif, "You are Essex Green?", putain on n'a la paix nulle part). Je vous raconte pas la suite parce que je suis pudique bordel (je dis quand même que Lee ronfle). On s'est quittés le lendemain matin après un petit déjeuner frugal.

    Comme tu peux le constater, je garde de ces moments un souvenir fort.
    Je te quitte cher lecteur patient (et/ou courageux, inconscient, insomniaque, égaré, tu choisis) avec ce dernier morceau, ultime chanson de l'ultime album (à ce jour): Slope Song, une douce ballade un rien déprimante qui évoque magnifiquement la vie à Brooklyn (Park Slope, à l'ouest de Prospect Park) et les plages de Coney Island un peu plus au sud.

    "I'm gonna find out."

     

     Eddy's live track #02 - The Essex Green - Whelan's, Dublin (19/10/2006)

     

    Pour finir ce billet enrichissant, je dirais que je donnerais beaucoup pour les revoir encore une fois. "I have been Greened". 

     

    p.s. Que Chris me pardonne (s'il lit ceci un jour) les quelques inexactitudes qui pourraient émailler ce récit (j'avoue que le passage sur BHL n'est plus très clair dans ma mémoire, peut-être était-ce Alain Finkielkraut...).

     


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  • Renaud - Où c'est qu'j'ai mis mon flingue ? - (1980)

     

    "J'veux qu'mes chansons soient des caresses

    ou bien des poings dans la gueule"

     

     Renaud...

    Comment dire ?... Renaud, c'est mon premier vrai grand coup de coeur en chanson française.

    Je me rappelle très bien avoir entendu, à la fin des années 70, en vacances et à l'arrière de la voiture familiale, un "tube" qui passait pas mal sur les radios périphériques : Laisse béton que ça s'appelait. Je devais avoir 7-8 ans. J'aimais bien, ça me faisait rire. Tout comme Marche à l'ombre, un rien plus tard (j'avais 9 ans). Voilà deux chansons qui me faisaient vraiment marrer. Y'avait plein d'argot et de gros mots dedans. Le bonheur.

    Renaud, c'est un des premiers à m'avoir donné le goût de l'argot. Avec mon grand-père maternel, un ouvrier qui ne savait pas faire trois phrases sans placer au moins un mot d'argot dedans. J'aimais bien l'écouter parler. Mon grand-père paternel aussi, j'aimais bien l'écouter (j'aime toujours l'écouter, parce que j'ai la chance de toujours l'avoir, lui), même s'il plaçait moins d'argot dans son vocabulaire, tout ouvrier qu'il fût aussi. Aucun des deux n'écoutait de musique, à part des chansons populaires à la radio, quand il en passait. Ils connaissaient surtout des chansons des années 30 à 50. Le reste de mon amour pour l'argot est venu des vieux films aux génériques desquels on trouvait les noms de Gabin, Audiard, Aurenche, Jeanson, Blondin, Jouvet, Arletty, Simon, Blier, Ventura, Carné, Renoir, Autant-Lara, Grangier, Granier-Deferre, Verneuil... etc... et que la télévision à trois chaînes nous jouaient régulièrement. Puis vint l'époque de la lecture assidue de San-Antonio pour parachever mon enseignement. De bons souvenirs, vraiment.

     

    Et donc, Renaud. Longtemps associé à ces deux chansons fondamentales.

    Un jour, mon oncle, dont je vous cause souvent mais que je ne vous ai jamais présenté... Tiens, c'est l'occasion... Je vais donc vous le présenter. Mon père est l'aîné d'une famille de cinq enfants (catholique et ouvrier, ça pardonne pas). Son plus jeune frère a 11 ans de moins que lui. Il est né en 1956. Ça veut dire qu'au tournant des années 80, il n'a pas encore 25 ans. Il est lui aussi ouvrier et il écoute de la musique de jeunes depuis la fin des années 60, avec sa soeur, née en 1953... La génération du Renaud, quoi. Ils écoutent Pink Floyd, Neil Young, Supertramp, Status Quo... et puis Maxime Le Forrestier, Alain Souchon... la "nouvelle chanson française", comme on disait à l'époque...

    Un jour, donc, au début des années 80,  ils débarquent tous les deux chez nous (oui parce qu'eux sont toujours dans la région stéphanoise alors que nous, on est déjà installé dans le sud) pour quelques jours de vacances. A l'occasion d'une descente dans un magasin de disques avec mon père, ils se ramènent avec les albums Place de ma mob, Le retour de Gérard Lambert et Marche à l'ombre. Mon père a aussi acheté ce dernier. Je dois avoir autour de 10 ans. J'userai ce disque  jusqu'à la corde ! (enfin non, je l'ai encore et il est toujours très écoutable).

     

     

    Shit in your ears

     

    Tignasse en bataille et en sueur, blouson de cuir, bandana, vitre cassée, regard qui tue, gueule d'ange mais patibulaire quand même, je le trouve rigolo, ce Renaud.

    Dans ces trois albums (Place de ma mob - Marche à l'ombre - Le retour de Gérard Lambert), j'aime tout. Je n'y vois rien à jeter. Ce sont toujours mes trois albums préférés. Avec mon frangin, on s'est fait une cassette des deux albums qui ne se trouvent pas en vinyle dans la discothèque paternelle et on la déroule assez souvent. Je me souviens aussi d'une nuit blanche, avec mon frère et mon cousin, à l'époque de Mistral Gagnant, où on avait passé toute la nuit à écouter (et à chanter parfois, voire à gueuler à tue-tête !) toutes nos cassettes de Renaud jusqu'au petit matin, avec une mention spéciale pour notre live culte : Un Olympia pour moi tout seul. Mémorable.

     

    Ce qui me plaisait surtout chez Renaud, outre le côté "rebelle" et "engagé" (quoique je ne m'intéresserai à la politique que beaucoup plus tard), c'était son humour. Sa façon de trousser ses textes et son humour. C'est d'ailleurs ce que je finirai par regretter le plus au fil du temps, son humour. Si présent au début, s'estompant légèrement au fil des années 80 pour ne plus apparaître qu'épisodiquement mais trop rarement par la suite. Un Renaud sans humour c'est comme un plat de nouilles sans sel ou un matelas sans oreiller, c'est quand même vachement moins bien.

     

    Pour l'heure, puisque mon père possède ce disque, je l'écoute beaucoup.

    Incontestablement, ma chanson préférée est alors ce Où c'est qu'j'ai mis mon flingue ?, provocation anarchiste de premier ordre, bête et méchante, réglement de comptes avec les "joies" de la célébrité naissante, où chaque couplet, chaque vers, chaque mot est un condensé de dynamite qui te saute à la gueule. Un régal. Aujourd'hui encore, je l'écoute avec la même jubilation qu'à 14 ans. Un miracle.

     

    Au fil du temps, une autre chanson de cet album rentrera au panthéon de mes chansons préférées : Mimi l'ennui.

    Renaud - Mimi l'ennui - (1980)

     

     Malgré un saxo dégueulasse et une couleur sonore limite, la mélodie et le texte emportent l'adhésion. C'est émouvant, triste (mais parfois amusant aussi), hyper réaliste,  superbement bien rendu et bien brossé. A chaque fois, je vois les images et je ressens tout. La grande classe.

     

    A une époque, dans ces moments de l'adolescence où on se sent parfois  au fond du trou sinon au bord du gouffre, et qu'on cherche désespérement quelques branches auxquelles se rattraper, je fus content d'avoir pu attraper au vol la branche Renaud... Elle fait à jamais partie de mon arbre de vie.


     

     

    Enfin, je peux pas vous laisser sans la touche d'humour finale. Une "chanson" qui divise les afficonados eux-mêmes. Une chanson sur laquelle se sont étripées les grandes plumes du forum du HLM de Renaud lors de mémorables joutes verbales, une chanson improbabale qui ne ressemble à rien et c'est pour ça qu'elle est indispensable. La pirouette finale de ce magnifique album : Pourquoi d'abord ? !

     

    Renaud - Pourquoi d'abord ? - (1980)

     

    Moi, cette voix de gamin  joyeusement interprétée et massacrée par un Renaud en grande forme m'a toujours rendu hilare. Couplée à un texte  pas piqué des vers collé sur une musique de troubadour pseudo-médiévale, ça fait ma journée. Je m'en lasse pas. Oui, vraiment, il fallait 10 chansons, sur ce disque.


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  • Bob Dylan - Ballad of a Thin Man - (1965)

     

    Bob Dylan (part 1)

    Mon premier contact avec Bob Dylan fut un rendez-vous manqué. Une compilation appelée Greatest Hits (1967), qui figurait dans la discothèque-mine d'or de mon oncle, dont je ne vous ai pas encore vraiment parlé, mais ça ne saurait tarder. Le problème, c'est que j'ai découvert Dylan alors que je venais de prendre une claque avec Pink Floyd, les Beatles, les Who, voire Neil Young. Du coup, Bob Dylan me paraissait un peu "fade" et trop folk (à l'époque, j'aimais que le rock, pas le folk) à mon goût. Et sa voix nasillarde ne me touchait pas encore.

    Ce n'est que bien plus tard, passé 30 ans, que je serai pris d'un coup par la magie de Dylan (mais j'évoquerai ça dans les part 2 et 3, sur 4 ou 5 prévues - putain vous allez en chier après en avoir bouffé, du Dylan !)

    Je connais peu la période purement folk, acoustique et "protestataire" de Dylan, la période pré-réncontre avec les Beatles, la période 1962-1964. Trop sec pour moi. Surtout que je fais rarement l'effort d'écouter les paroles et que je maîtrise mal l'anglais, alors quand en plus il est poétique et politico-social...

    Mais d'emblée, dès que je me suis penché sur le parcours dylanien, j'ai été séduit par la démarche de Robert Allen Zimmerman, l'homme libre. On le voulait chef de file de la "protest song" et pape de la contre-culture quand il ne cherchait qu'à être un artiste à part entière, un type qui fait ce qu'il veut, quand il veut.

    En 1965, quand il électrifie sa musique et qu'il se lance dans le folk-rock, c'est l'hallali, la curée. Les admirateurs, les fans de la première heure, crient au scandale, à la trahison, à la récupération, au vendu. J'adore. Dylan s'en fout. Sur scène, il est hué. On ne le respecte plus . En interview, il est caustique et brillant. Classe. Dylan, il veut juste être écouté et le passage à l'électricité lui semble nécessaire. Dylan a influencé les Beatles avec ses textes et les Beatles ont influencé Dylan avec leur musique.

    J'avais noté quelque part une citation de Bob Dylan que je viens de retrouver, je la recopie ici :

    "We were driving South Colorado. We had the radio on and eight of the Top Ten songs were Beatles' songs. They were doing things nobody was doing. Their chords were outrageous, just outrageous, and their harmonies made it all valid. I kept it to myself that i really dug them. Everybody else thought they were for the teenyboppers, that they were gonna pass right away. But it was obvious to me that they had staying power. I knew they were pointing the way the music had to go. In my head, The Beatles were it !"

    C'est beau.

     

    Shit in your ears

     

    Et donc, à partir du moment où Dylan électrifie et densifie sa musique, ça m'intéresse.

    Ballad of a Thin Man est mon morceau préféré de cette période, celle qui va jusqu'à son accident de moto en 1966. Celle de la "trilogie" Bringing It All Back Home - Highway 61 Revisited - Blonde on Blonde. Le texte est assez hermétique et onirique, on l'interprète comme on veut. Quant à la musique, elle me file toujours des frissons de là à là, mélancolique et étrange à souhait. Je peux passer des heures à écouter ce morceau.

     

     

    Cette période s'était donc ouverte en 1965, avec l'album Bringing It All Back Home, dont ce magnifique et célèbre titre qui ouvre l'album, Subterranean Homesick Blues, un autre de mes morceaux préférés, que je ne peux m'empêcher de vous coller ici :

     

     

    Bob Dylan - Subterranean Homesick Blues - (1965)

     

     

    Shit in your ears

    Bob Dylan, Sally Grossman et le chat de Sally, pour la pochette de Bringing It All Back Home, 1965

     

     La face A de l'album est électrique alors que la face B est acoustique.

    Dylan ne franchira le pas du tout électrique qu'avec l'album suivant, Highway 61 Revisited (1965 aussi), dont est tiré Ballad of a Thin Man.

    L'album Blonde on Blonde (1966), pourtant considéré comme son chef-d'oeuvre, m'emballe moins que ces deux-là, même si y'a plein de bons trucs que j'aime dedans, mais je vais pas vous assommer avec ça...

     

     

    En guise de bonus track, je vous poste ici un de mes morceaux préférés de la première période de Bob Dylan, la période protest song-folk. Ça s'appelle Masters of War et ça figure sur l'album The Freewheelin' Bob Dylan.

     

    Bob Dylan - Masters of War - (1963)

     

     

    Shit in your ears

    Bob Dylan et Suze Rotolo, pour la pochete de The Freewheelin' Bob Dylan, 1963


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  • "I've seen the world, kissed all the pretty girls
    I've said my goodbies and now I'm ready to die"




    Commencer par la fin, tout un programme. Enfin, la fin des Unicorns, pas la fin des merveilles produites par les deux membres du groupe: Nick Diamonds/Thorburn et ses excellents Islands et Alden Ginger/Penner en solo ou avec Clues, expérience intéressante mais de courte durée (je ne vous parlerai pas de Mister Heavenly, Hidden Words, Human Highway, Th' Corn Gangg, Reefer...). 

    Donc ce morceau, Ready to die, clôt cet excellent dernier (c'est pas loin d'être le premier aussi) album des trop tôt disparus Unicorns: Who Will Cut Our Hair When We're Gone? Si je vous dis que le premier morceau s'intitule I don't wanna die, que trois des treize morceaux contiennent le mot "ghost" dans leur titre, que les paroles suivantes sont tirées du pénultième morceau Les os : "I want to die today and make love with you in my grave", quel est à votre avis le thème principal dudit album?

    La mort, oui, quelle perspicacité. Et la mort dans toute sa splendeur. Quelle jubilation. Quel bonheur. Oui les paroles sont parfois sinistres et le délire est un peu morbide mais c'est fait avec tellement de désinvolture et d'ironie qu'on en redemande. "Est-ce que j'écoute de la musique pop parce que je suis malheureux ? Ou suis-je malheureux parce que j'écoute trop de musique pop ?"

    Je remets un morceau parce que c'est bon (peut-être le seul d'ailleurs à ne pas parler de la mort). 

    J'ai eu l'immense chance de voir ces couillons sur scène avant qu'ils ne s'autodétruisent. C'était en août 2004. Deux concerts deux jours de suite. Le premier à Amsterdam, poussif, sans véritable âme, le groupe n'est pas parvenu à rendre l'enthousiasme et la spontanéité de l'album, un peu décevant. On s'est quand même tapés Liège le lendemain pour les voir à l'Escalier. On a bien fait. Putain, oui, quel concert mes aïeux. Je crois même me souvenir que j'ai bougé les jambes (pour la tête je ne confirme pas). J'ai, depuis, eu l'occasion de voir Islands et Clues en concert et je n'ai jamais retrouvé cette pêche qu'ils nous avaient donnée avec The Unicorns. Dommage.

    Mais bon, je vais quand même pas finir sans vous faire écouter ce qu'ils ont fait après.
    Tout d'abord cette petite vidéo d'Alden Penner, enregistrée cette année pour un petit EP moyen, mais ce morceau me fait toujours craquer.



    J'arrête de vous emmerder (c'est moi ou j'ai encore rien écrit d'intéresant dans ce billet?) avec ce dernier morceau, tiré du dernier album en date de Islands.


    Voilà, bonsoir et salut à Matt qui adorait cet album des Unicorns et qui aurait eu 33 ans aujourd'hui.

     

     

     

     

    p.s. Vous aimez les maisons hantées? Vous avez toujours rêvé d'entrer dans une maison hantée en pleine nuit sans jamais oser? Les Unicorns l'ont fait pour vous:

     


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